Architecture
03.08.2021

P027    Sonoscope


Sur la colline, juste avant le village, un fossé. Trace d’un passé qui persiste mais s’érode, il est envahi par les branchages, les mousses, les tiges et les troncs. La forêt bruisse doucement, fait oublier la route toute proche, coupe du reste du monde.

Elle me laisse seul avec moi.

Elle me laisse seul avec elle.

Je veux l’entendre, faire corps, faire coeur.

J’entre dans le fossé et oublie bien vite qu’il en est un. Je suis dans les bois, je veux les écouter, les découvrir, mieux les connaître, mieux les comprendre. Cet espace qui me rebutait de prime abord m’attire maintenant, je veux m’y perdre, y jouer, y rester un peu.

Profiter du calme.

Pour entendre ce que je vois, voir ce que je sens, sentir ce que je suis, un sonoscope.

Des brindilles et un cône pour écouter les bois.

Dans la longueur du fossé pour plonger en son coeur.

Deux ouvertures, une petite pour que je puisse y coller l’oreille et une grande pour que le fossé puisse me parler. Une expérience amplifiée qui me fait redécouvrir ce lieu étrange, introspectif et oublié.

J’écoute, je peux voir et même crier, cet endroit qui m’intimidait ne m’effraie plus maintenant.

Tout de bois, cet objet curieux m’attire jusqu’au fond de ce creux que je n’avais pas vu. D’un côté, les premières maisons de Vaudémont me surveillent. De l’autre, la source et le sentier m’appellent. Ici, je suis seul, je suis caché. Le ciel me reste ouvert mais je replonge vers le sol. Je retourne à mon incongruité.

Le sonoscope se place dans l’axe du fossé. Visible depuis la route, il interroge, souligne la linéarité de son milieu en l’hypertophiant pour mieux en jouer. S’en approcher demande de descendre dans le fossé, l’expérimenter permet de plonger en son coeur. Pratique individuelle dans son dispositif, son échelle en fait une architecture générant une expérience collective dans son lieu, rend intime un lieu pouvant intimider.

Écrin accueillant le dispositif d’écoute, la structure porteuse contraste par sa légèreté avec le cône qu’elle contient, imposant et disproportionné. Reconnaissable dans sa forme, c’est son échelle qui surprend et qui invite à l’expérimentation. L’un comme l’autre allient solidité et frugalité, variant les assemblages et limitant les découpes pour faciliter la mise en chantier.

Le tout crée un décalage, un unheimlich à même d’habiter cet espace délaissé.

Projet Construit
Projet Lauréat
Micro-architecture, construction bois
Festival de l’Echo du Marteau
Avec Allan Mensah, Arnaud Delvit et Victor Bois

Colline de Sion, 54330 Vaudémont
48°24’55.8”N 6°03’26.8”E
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